Présentation du blogue

Onze finissants d’Arts et Lettres accompagnés de deux enseignants, Christian Braën et Guy Bourbonnais, suivront les traces de Haruki Murakami, auteur à l’étude sur lequel ils se sont penchés avec ardeur, au Japon. Suivez-les à travers leurs textes, témoignages de découvertes, d’éblouissement et d’éveil. Ce voyage est pour eux l’occasion de se plonger concrètement dans l’univers ambivalent et onirique de Murakami.

mardi 21 juin 2011

Bilan de mon voyage

Cela fait quelques jours à peine que notre avion s’est posé sur le sol québécois. Je m’ennuie déjà de tous les beaux moments que j’ai vécus dans ce pays qui, deux semaines avant, ne m’était connu que par l’œuvre de Murakami. Chaque fois que j’y repense je me dis qu’il y a quelques mois seulement, je comptais le nombre de jours qu’il me restait avant de m’envoler, de découvrir Tokyo, Kyoto, Iroshima et Naoshima. Et maintenant je me dis : voilà c’est déjà fini, tu es maintenant de retour dans ta ville natale.

En sortant de l’aéroport, j’ai vu toutes les réparations routières qu’on croisait sur notre chemin et j’avais presque le gout de sortir et de courir pour reprendre l’avion et retourner dans ce paradis terrestre qu’est le Japon. Oui, je me mets à repenser à tout ce que j’ai vécu et vu et j’ai l’impression que même s’il n’est pas parfait, le Japon est devenu mon paradis à moi. Dès le moment où je tombe dans la lune, à n’importe quelle heure de la journée, je commence à penser à Kyoto, à ces gens généreux qui nous ont accueillis, comme si nous étions des membres de leur famille, et qui auraient tout fait pour parfaire notre bonheur; tous les petits gestes qu’ils pouvaient accomplir pour nous rendre service, ils les auraient faits. Cette auberge est devenue un peu ma deuxième maison pendant les cinq nuits de notre passage à Kyoto. On m’aurait demandé d’y vivre et j’aurais dit oui, sachant tout ce que cette ville avait à nous offrir. Des temples, encore des temples, le Pavillon d’or -- mon préféré – et le sentiment d’être en paix avec la nature, avec soi, dans le silence, la sérénité.. Tout le monde devrait avoir droit, un jour, de connaître le bonheur que procure le Japon, le sentiment de se trouver dans un endroit si familier et si inconnu à la fois, si proche et si loin de soi.

Dès le moment où l’on pose un pied au Japon, on se sent comme chez soi, on a l’impression d’être dans un rêve.  Des gens que l’on ne connaît pas nous aiment et nous accueillent comme si nous étions des amis de longue date, la confiance qu’ils ont en nous dès le moment où ils croisent notre regard, l’insouciance qu’on a en entrant de ce monde qu’est le Japon. 

À la fin du voyage il est vrai que j’avais hâte de retrouver mon lit ainsi qu’un bon verre de lait, mais pour rien au monde je regrette ces deux semaines passées dans ce pays étranger devenu un peu plus familier à mes yeux. La joie de découvrir, d’apprendre, de voir toutes ces choses nouvelles et magnifiques qui resteront gravées en moi, me remplissent d’une grande joie. Il est vrai que je peux les voir et les montrer en photos, mais jamais ceux qui n'y ont pas voyagé ne contempleront la même vue que j’avais sur l’océan, le jour de notre arrivée à Naoshima. Personne ne pourra voir le mouvement des vagues, le reflet du soleil sur celles-ci. Ils ne pourront pas constater l’immensité qui se trouvait devant moi, autour de moi, en moi. Ces moments-là, ils restent en moi, et mes proches ne peuvent qu’imaginer ce que j’ai vécu, car ils ne l’ont pas vu.  Je leur souhaite un jour, de voir ce que j’ai vu, de vivre ce que j’ai vécu et qu’ils se rendent compte de l’immensité du monde qui nous entoure, de sa beauté.

Demain, la routine recommencera. Demain le boulot! J’aurais voulu que ça dure plus longtemps, savourer encore quelques temps ces journées d’humidité et de chaleur, voir une nouvelle merveille que propose le Japon, apprendre encore un peu plus sur leur vie, rester toujours un jour de plus, ne pas comprendre ce que les gens autour de moi disent, sourire à une japonaise qui croise mon regard et qui me lance un sourire en coin, être accueillie comme une amie alors que je suis une pure inconnue, venue d’un pays qui se trouve de l’autre côté du globe.

Je suis revenue au Québec. J’ai retrouvé ma famille, mes amis, mon lit, un verre de lait. Mais je suis aussi partie, partie d’un pays qui m’avait adoptée le temps d’un voyage. Il s’est révélé à moi, mais il m’a aussi fait grandir. Il m’a appris sur moi. Je suis partie, mais j’espère un jour, le retrouver, recommencer à le découvrir, toujours un peu plus. 

PAR SARAH-KIM BOUDREAULT

Le retour

Je ne sais plus du tout quel jour on est. Les aiguilles du cadran semblent tourner à l’envers. Alors que le soleil est à son zénith, mon corps s’alourdit et je finis par tomber dans un lourd sommeil. Alors que la lune brille de mille feux dans un ciel sans étoiles, j’erre seule dans ma maison silencieuse et enveloppée par les ténèbres.  Depuis mon retour, je suis tombée dans un véritable abysse temporel.  Les deux derniers jours depuis mon retour ne semblent former qu’un et les heures défilent à un rythme inconstant.  Mon voyage des deux dernières semaines m’apparaît par moments comme un doux rêve dont je viens de m’extirper.

À travers les images désordonnées et fragmentés de mon voyage qui m’apparaissent comme un véritable fractal, je revois les villes que mes pieds ont foulées, les visages accueillants et souriants que j’ai croisés, nos chambres d’hôtel  dignes d’un véritable capharnaüm et les cernes bleutées sur les visages de mes compagnons toujours prêts, malgré la fatigue, à partir à la découverte de la jungle urbaine de Tokyo ou de temples zens de Kyoto.

Je revois plus nettement Tokyo, première et dernière ville avec laquelle j’ai eu un contact lors de mon périple au Japon.  Me revoilà à la sortie de la gare de Shibuya.  La foule dense et compacte au pied des gratte-ciels ambitieux m’aspire d’un seul coup et m’entraîne dans son tourbillon effréné. Traverser une intersection représente alors pour moi toute une épreuve de force! Les grands magasins défilent de chaque côté de la rue, Zara, Gap, H&M, décevant…  L’insupportable tube Price Tag m’irrite les tympans lorsque je l’entends à répétition. Je bifurque dans une petite rue qui me mène vers le quartier de Harajuku… impressionnant! De charmantes boutiques et des friperies vintage se révèlent comme de véritables cavernes D’Ali Baba.  Je prends également un plaisir fou à engloutir l’une de ces immenses crêpes que l’on vend à chaque coin de rue fourrées de crème fouettée et de caramel dégoulinant bien chaud. Décadent!  Tokyo c’est également la ville du karaoké. J’ai encore en acouphène l’écho des voix éraillées de mes pairs qui s’époumonent en interprétant des succès pop des dernières décennies dans un décor quelque peu kitsch.  Tokyo, au-delà de son caractère grandiose et superficiel, capte nécessairement l’attention de ses visiteurs en stimulant leurs sens par ses couleurs éclatantes, ses odeurs fortes et inconnues se faufilant en dehors des restaurants et par ses sonorités étourdissantes.

Je me rappelle également Kyoto, une ville qui présente un équilibre parfait entre la tradition et la modernité. La démarche délicate et quelque peu coincée de femmes vêtues de kimono aux côtés de fashionistas perchées sur leurs talons aiguilles en plein centre-ville m’étonne au premier coup d’œil. C’est à cet  endroit que l’union de notre groupe de voyageurs s’est solidifiée. Je nous revois autour de la table de notre petite auberge ou bien autour du jardin papotant de tout et de rien lors des petits déjeuners.   C’est également à ce moment que nos professeurs accompagnateurs ont laissé tomber leur façade d’autorité pour devenir, au sein de notre groupe, des compagnons de voyage. Je me remémore la visite de temples parfois sublimes, parfois dotés d’une simplicité renversante.  Une toute nouvelle sensibilité à la beauté de la nature et à la capacité de création humaine se sont révélés à moi lors de ces découvertes.  La dernière image qui me reste de cette charmante ville est celle de notre sympathique aubergiste au cœur démesurément grand qui nous envoie la main au pas de son auberge alors que le groupe quitte définitivement l’endroit sur le bord d’une étroite rue bordée d’un petit ruisseau.

Je revois Hisroshima comme une ville qui, en surface, ne laisse paraître aucune cicatrice des terribles événements passés.  Une visite au Musée de la Paix me fait comprendre que les blessures ne sont pas totalement refermées; on se souvient encore.  Plus de soixante ans après la tragédie du 6 août 1945, la bombe nucléaire laisse une trace amère de souffrance à travers les générations. Les arbres ont poussé du sol calciné, l’eau de la rivière est redevenue translucide, le soleil a percé  les nuages de fumée, mais l’horreur et la souffrance soufflent encore parmi les feuilles, coulent encore à travers le courant et flottent toujours dans le ciel.

La visite de l’île de Naoshima représente pour moi une parenthèse agréable à travers le voyage. Alors que je me trouvais dans la société la plus technologique de monde il y a quelques jours, je me retrouve alors les deux pieds dans le sable déconnectée de toute forme de technologie.  La visite des musées de Naoshima est pour moi une réconciliation avec les formes d’art modernes, abstraites ou conceptuelles auxquelles j’étais réticente auparavant.  L’île de Naoshima, c’est également le décor aux résonnances mystérieuses et typiquement murakamiennes dans lequel le groupe de voyageurs mange ensemble dans une pénombre  nocturne avant de potiner et de s’esclaffer à l’écoute d’anecdotes sans queue ni tête dans une yourte où tous se sont réunis.
De retour à Montréal, l’horrible tube Price Tag m’écorche les oreilles dès que je mets le pied dans l’automobile de ma mère.  Le mauvais goût musical est international on dirait bien.  Je retourne donc chez moi, le cœur léger et l’esprit lourd d’images et de souvenirs.  L’hospitalité et la politesse des Japonais me manquent dès le moment où un automobiliste enragé nous coupe en nous envoyant un charmant doigt d’honneur… Ahh Montréal! 

PAR ÉLISE PROVENCHER

jeudi 16 juin 2011

Nouvelles photos

Vous pouvez voir une série de photos prises par Étienne au cours du voyage, en cliquant sur ce lien

Aussi, nous vous invitons à venir jeter parfois un oeil sur le blogue au cours de la semaine qui vient, puisque quelques textes, qui prendront la forme de bilans de voyage, seront publiés.

mercredi 15 juin 2011

Volutes de Tokyo

« Un autre gin tonic, Jacky », lançai-je au sympathique barman hier soir alors que nous avions fait la hasardeuse découverte d’un petit bar de la taille d’un placard à balai dans une rue retirée d’un quartier animé de Tokyo. « Call me Jacky », nous lance le barman un peu timide derrière un large comptoir de bois éclairé par une lumière chaleureuse qui projette notre ombre sur les murs quelque peu jaunis par la fumée des cigarettes qui s’évapore en un épais nuage au-dessus de ma tête.  Je toussote un peu, n’étant pas habituée de baigner dans la fumée secondaire dans un lieu aussi clos lors d’une sortie. Un hautparleur crache  une mélodie reggae qui crée une atmosphère de détente instantanée après une longue journée de transport.

La journée du lendemain se résume à une virée de shopping dans le quartier de Ginza et le spectacle de théâtre du type Kabuki.  Cette dernière activité me laisse planer dans un sentiment de doute et d’incompréhension. Les codes théâtraux ne correspondent pas du tout à ce que je connais du théâtre occidental.  Les acteurs semblent, à première vue, jouer faux et grossièrement dans leur kimono fleuri et sous leur maquillage de geisha. Vous avez bien lu, aucune actrice n’est présente sur scène; même les personnages féminin son tenus par des hommes. Parmi les spectateurs,  les cris de spectateurs explosent à travers la salle. Leur attitude, habituellement si calme, me trouble lorsque des encouragements et des applaudissements sont lancés pêle-mêle à un moment de la pièce qui me semble totalement aléatoire.

La soirée se termine dans un restaurant de grillades. Les types de viandes sont difficilement identifiables. Je me rends compte, en me pourléchant les babines, que je viens de manger le cœur d’un quelconque animal! 

PAR ÉLISE PROVENCHER

Tokyo

14 juin

Les gens défilent, tous différents les un des autres, ils vont à une vitesse continue, arrêtés seulement par une lumière rouge. Les jupes virevoltent, les vestons se frôlent. Tous vont dans une destination quelconque. Décidés à poursuivre leur destin, ce n’est pas la foule dans la rue, ni les trains, remplis à pleine capacité qui vont les arrêter.

Nous, touristes québécois, à la recherche de nouvelles aventures, cheminons à travers la voie qu’ils se tracent, à la recherche d’un nouveau monde, complètement changé de celui que nous avons quitté il y a maintenant deux semaines. Nous tentons de prendre la moindre particule de pays qu’ils nous donnent et nous en profitons le plus possible.

Après quelques heures de magasinages, nous sommes allés dans un théâtre Kabuki typiquement japonais. Alors que nous tentions de comprendre le sens des pièces (puisqu’il y en avait trois en tout), les acteurs jouaient sur scène et plusieurs spectateurs, eux dormaient, la tête penchée de côté, sommeillant, perdus dans leurs rêves. De la façon dont nous étions placés, la moitié de la scène nous était cachée, alors la pièce perdait en quelque sorte un peu de charme. L’expérience était enrichissante, nous avons pu, à la suite, comparer le théâtre que nous avons toujours connu, à celui-ci d’un style très différent. Le théâtre japonais m’a semblé moins convaincant que ne l’est celui du Québec. En fait, les spectateurs viennent voir un acteur en particulier, ce n’est pas la pièce qui les intéresse, mais la personne qui joue la pièce.

À la suite de cette démonstration d’art, Christian a tenté de nous trouver, pendant plusieurs instants, un restaurant où on nous servirait des brochettes. Finalement, nous avons choisi un restaurant où tout était écrit en japonais, même les prix. Alors il a commandé un peu n’importe quoi, au hasard, son ‘’petit doigt’’ lui disant que cela allait être bon. Il ne s’est pas trompé, plusieurs sortes de mets nous ont été apportées. Des brochettes de poulet, de bœuf, de porc et de viande que nous ne connaissions pas ont atterri sur notre table.
Nous avons arrêté de manger, seulement lorsque nous sentions que nous allions exploser. Le souper que nous avons mangé ce soir était notre avant dernier souper avant notre retour au Québec et nous en avons, je crois pour la plupart, tous profité.

PAR SARAH-KIM BOUDREAULT

La Barque solitaire

Tetsuo se  redresse soudainement sur son lit, suintant et essoufflé. Le jeune homme enfile ses pantoufles et va se rafraîchir les idées à travers le terrain de camping de l’île de Naoshima. Le ciel bleuté se répand comme une immense peinture à travers la nuit paisible de ce mois de juin. Le délicat clapotis des vagues brise le silence pesant, lourdement suspendu dans l’air. Alors qu’il sort de la salle de bain, Tetsuo croit apercevoir sur le rivage une lueur perçant les ténèbres épaisses.  L’homme s’approche de la plage et remarque la présence d’une petite barque près du quai.  Au fond de celle-ci, une petite lampe de poche encore ouverte éclaire la page couverture de L’Autre côté du miroir, posé ouvert sur le banc de la petite embarcation.  Étrange coïncidence, Tetsuo venait de finir ce roman la semaine dernière. Le jeune homme finit par pénétrer dans la barque et découvre sous un banc ce qui semble être l’itinéraire d’un voyage. Départ à Tokyo, arrêt à Kyoto, passage à Hiroshima; ces destinations sont  exactement les mêmes que les siennes. Tetuso, après avoir attendu que le mystérieux propriétaire du bateau ne revienne, retourne se coucher avec une impression de déjà vu qui hante les recoins de son esprit. Au réveil, la petite barque a  disparu sans laisser de trace.
Le lendemain soir, Tetsuo profite d’une soirée entre amis bien arrosée afin de célébrer le début des vacances. Alors que le groupe est aggloméré autour d’un feu de camp et d’une pyramide de bières, le jeune homme perçoit au loin, sur la plage, un petit point rouge d’où s’envole en véritables arabesques une fumée blanche et diaphane. Des motifs de tourbillons s’effritent à travers un ciel constellé d’étoiles. On aurait dit qu’une main invisible a lancé un amas de confettis brillants sur une immense toile opaque.  Tetsuo décide de quitter son groupe d’amis pour s’approcher de ce point rougeoyant. Alors qu’il retrouve l’endroit sur un rocher plat à l’extrémité de la plage, il ne découvre à ses pieds qu’une cigarette Malboro encore bien fraîche et fumante. Aucune trace du mystérieux inconnu. Il fouille dans sa poche, tire un paquet de Malboro et s’allume une cigarette en regardant les vagues recracher des amas d’algues gluantes sur la plage.

Lors de sa dernière soirée passée à Naoshima, Tetsuo tente le tout pour le tout afin de découvrir l’identité du véritable spectre qui semble hanter la plage depuis deux nuits. Il se positionne sur le quai et attend patiemment l’éventuel indice qui pourrait le guider vers l’énigmatique homme. Dans les alentours de minuit, Tetsuo croit apercevoir une ombre à travers les rochers au bout de la plage. Le jeune homme, préalablement tout habillé de noir, se faufile sans faire du bruit vers cet endroit. Le paysage sombre des montagnes se liquéfie à travers la sombre nuit qui enveloppe le camping.  Tetuso finit par s’approcher de la silhouette d’un homme accroupi sur le rebord d’un abrupt rocher. Les volutes de fumée d’échappent de sa cigarette déjà bien entamée. « Bonsoir », lance l’inconnu avant même que Tetsuo ne se soit approché de lui. « Bonsoir », lui réplique le jeune homme à la fois surpris et blessé dans son orgueil, l’homme ayant senti sa présence à distance.  Tetsuo vient s’asseoir à côté de l’inconnu et lui découvri une physionomie très banale : traits réguliers, nez droit, cheveux noirs et raides.  Après plusieurs minutes de silence oppressant, Tetsuo finit par demander à l’homme ce qu’il vient faire sur l’île de Naoshima. « Pour fuir , lui répond naturellement l’inconnu, fuir les collègues qui rêvent toute l’année aux deux semaines qu’ils prendront pour faire la crêpe à Hawaï, fuir ma femme qui batifole deux fois par semaine avec son associé lors d’un « dîner d’affaires », fuir mes enfants qui n’attendent que leur cadeau lorsque je reviens de voyage. Ça te dirait de prendre une marche sur la plage avec moi?
-Bien sûr, je crois que moi aussi, je  cherche un peu à fuir ».

Le lendemain matin, ne retrouvant pas leur ami dans sa tente, les compagnons de Tetsuo font le tour du terrain de camping.  Sur la plage près du quai, ces derniers retrouvent presque totalement enfoui dans le sable un exemplaire de L’autre côté du miroir.  Les pages bosselées dégoulinent d’une encre diluée. À partir de là, les compagnons observent sur le sable humide une seule trace de paire de pieds qui débute du rivage et qui aboutit dans la mer. Les vagues viennent lentement effacer la dernière présence de Tetsuo.

Fin. 

PAR ÉLISE PROVENCHER

lundi 13 juin 2011

Naoshima

Nous venons tout juste de quitter cette île aux falaises escarpées, aux forêts verdoyantes, entourée de l’océan, qu’est l’île de Naoshima. Elle nous a accueillis, sous un soleil de plomb, nous, les treize voyageurs. Après avoir fait une traversée en bateau, à travers de nombreuses autres îles, nous sommes finalement arrivés à bon port. Le soleil nous illuminant, nous avons commencé notre périple sur cette montagne de sable, en allant acheter notre repas. Ensuite, un petit tour d’autobus à travers cette petite ville nous a permis de nous rendre compte de la beauté que nous offrait Naoshima.



Le fait que nous ne dormions pas dans un hôtel, mais dans des yourtes,  ajoutait au charme que nous proposait cette île. Un petit crabe se promène dans la rue, il a peur, il s’enfuit. La plage est déserte, nous commençons à la meubler avec nos rires et nos conversations. Plusieurs se risquent dans la mer, l’eau est froide, les algues frôlent nos jambes, l’espace d’un instant, un poisson fait un bond hors de l’eau; le temps que nous regardions, il était déjà replongé sous l’eau. Nous passons la fin de notre première journée assis sur le quai, à regarder l’immensité, l’infini qui s’étend à nos pieds. L’eau est partout, quelques fois supprimée par les îles voisines.



Le soir, nous nous couchons au son des rires de la tente d’à côté et par le bruit des vagues qui vont et qui viennent, avec leur flot incessant.



La deuxième journée sur l’île, nous partons sous la pluie pour aller visiter deux musées d’art moderne, proposant autant du Claude Monet que des œuvres pour le moins étranges.

PAR SARAH-KIM BOUDREAULT

l'Art contemporain

Le sable mouillé s’infiltre doucement entre mes orteils qui frôlent l’eau de la mer salée bordant l’île de Naoshima. Les algues, dansant sous le rythme des vagues, habillent mes jambes qui s’agitent. L’eau glacée bleuit mes doigts et mes lèvres, mais le plaisir ressenti à ce moment de baignade dans la mer surpasse tout type d’inconfort. À cet instant, j’ai tout simplement l’impression de vivre. Les cris de joie de Myriam, Giulia et Charlotte se mêlent au murmure des vagues qui viennent lécher le sable fin et humide de la plage.  Je retourne dans ma yourte, grelottante comme une feuille sèche, animée d’un bien être qui me fait profiter de chaque seconde de ce moment présent.

Le lendemain, le groupe participe à la visite de trois musées d’art contemporain. L’implication du spectateur dans la majorité des œuvres égaie même les plus réticents à la tournée de  musées.  Le premier arrêt se fait au Benesse Art Museum. Alors que je reviens d’un terrain de camping, je me retrouve maintenant devant une véritable œuvre architecturale moderne. Le contraste est frappant; béton et buissons cohabitent en une harmonie parfaite. Je prends un plaisir particuliers devant les œuvres colorées ou loufoques de Warhol, Nauman et Hockney ou de celle plus conceptuelle, « Banzai Corner », de Yukinori Yanagdei, proposant une vision du Japon où l’esprit de communauté prime sur l’initiative individuelle. 



Je tombe sous le charme du Chichu Art Museum. Ici, l’architecture du bâtiment, dessinée par l’architecte Tadao Ando, se mêle littéralement aux œuvres plastiques de James Turrell, Claude Monet et Walter de Maria.  Les œuvres de Monet, exposées à la lumière naturelle dans une salle immaculée, se caractérisent par des couleurs profondes. La lumière du soleil dans la toile semble onduler sur la surface de l’eau. James Turrell, de son côté, fait de la lumière une forme d’art à part entière. Ombres et lueurs, abstraites et intangibles, deviennent ici un véritable médium artistique. Par ses jeux de lumières, certaines œuvres s’offrent à moi comme une espace infini et onirique qui me déstabilise du premier coup d’œil.  Walter de Maria, de son côté, propose un espace aux allures de 2001 Space Odyssey.  Un large escalier entouré de sculptures couvertes de feuilles d’or est reflété dans une immense sphère de granite qui trône au centre de l’immense pièce.  La lumière, que traverse l’endroit d’est en ouest, rebondit sur ces œuvres fascinantes et irréalistes. 



Je quitterai demain, avec nostalgie, ce lieu empreint d’une atmosphère particulièrement murakamienne. J’imagine Kafka longeant la rive sablonneuse rêvassant à son destin. Je vois l’adolescent du roman tournoyant sous la pluie qui rebondit sur toit de ma tante. Je crois apercevoir ce même garçon errer à travers les spectres de la forêt des montagnes qui enlacent le petit camping de Naoshima. 



PAR ÉLISE PROVENCHER

Souvenir d'Hiroshima

Le ciel s’éteint en quelques secondes. Le son lointain d’un grondement de tonnerre enveloppe le silence de la maison. Tout devient soudainement noir. Ma vie et celle de milliers d’innocents déboulent à cet instant dans un véritable abîme obscur dont l’écho des cris et des cœurs se répercute sur ses parois de cendres effritées par le feu. J’ouvre les yeux, j’ai l’impression que ma rétine reste collée à l’intérieur brûlant de mes paupières. À travers une rangée de cils clairsemés et carbonisés, je constate que ces sensations ne proviennent pas d’un cauchemar.

En tâtant le sol à la recherche de la porte, je trébuche contre un tison brûlant qui me fait perdre  l’équilibre et qui me blesse à la cheville. La douleur cuisante est insupportable. La soif étreint ma gorge enflammée. Une épaisse main de feu me caresse violemment le corps et finit par m’arracher les derniers lambeaux de vêtements sous l’impulsion d’une passion destructrice. Sous l’étroite ouverture de mes yeux agonisants, une dense fumée se faufile en volutes jusqu’au plafond de poutres de ma demeure. Je réussis, après avoir déployé des efforts surhumains, à atteindre la porte de la maison dont les murs crépitent comme un feu de camp sous l’assaut des flammes infernales.

À l’extérieur, une vision apocalyptique se présente à moi. Un ciel  rougeoyant est encombré de nuages enflammés qui couvrent l’ensemble de la ville. Le soleil et la vie sont restés enfermés dans les replis des souvenirs des survivants entre le désespoir et la colère. Une pluie d’encre noire s’abat sur la ville de cendres. Cette encre écrit le destin d’Hiroshima et scelle le souvenir de cette destruction de l’humain par l’humain. Cette même encre dévoile encore aujourd’hui la persévérance et le courage de des habitants qui ont enfin pu voir la lumière et la vie à travers les ténébreux et denses nuages. Je pousse mon dernier souffle au centre d’une véritable mer de cadavres carbonisés. Je me souviendrai d’Hiroshima. 

PAR ÉLISE PROVENCHER

Hiroshima pour toujours

Sa grand-mère lui parlait souvent de cet événement qui avait tant marqué sa ville natale. Elle avait vécu l’explosion de la bombe atomique. Elle avait vu tous ces gens souffrants, brûlés, morts. Elle disait qu’elle faisait encore des cauchemars, dans lesquels elle voyait les cadavres de sa mère et de sa sœur. Elle était âgée de seulement douze ans à cette époque, mais cet événement  avait changé le cours de sa vie. Le matin même, elle était partie, pensant que plusieurs heures plus tard, elle retrouverait sa famille pour le repas du soir. Malheureusement, cette journée-là avait été comme les autres. Alors qu’elle allait en direction du lieu où elle travaillait pour l’effort de guerre, une déflagration s’était fait entendre. Pendant ce qui lui semblait être plusieurs minutes, elle avait perdu connaissance. Trouvant le courage de se relever, elle avait marché jusqu’à l’endroit où quelques instants plus tôt, il y avait sa maison. À moitié effondrée, celle-ci était en train de brûler. Elle n’a pu sauver sa mère et sa sœur. 

C’est seulement quelques heures plus tard, que son frère l’a retrouvée.
Ils ont réussi à survivre. Leur famille avait été décimée, mais ils se sont soutenus et ont réussi à se reconstruire une maison. Pendant quelque temps, ils ont vécu ensemble, tentant d’accepter le deuil, mais lorsqu’elle a eu 18 ans, son frère est parti. Il ne pouvait plus vivre dans cette ville de souvenirs, il avait besoin de quitter sa ville natale pour tenter de trouver son bonheur ailleurs.

Chaque année, depuis qu’elle était toute jeune, sa grand-mère lui racontait cette histoire. Elle voulait lui décrire la douleur qu’elle avait ressentie à cette époque, mais surtout, elle voulait lui faire comprendre que même lorsque tout semble détruit et perdu, il y a toujours un moyen de trouver la force de réussir et de recommencer au début.

Demain, ça fera un an de plus, comme à chaque année.

PAR SARAH-KIM BOUDREAULT

samedi 11 juin 2011

Deux jours à Hiroshima

9 juin

Il aurait été souhaitable que cette nouvelle ville qui s’étendait à mes pieds et que je voyais pour la première fois me fasse le même effet que Kyoto. Malheureusement, cela ne s’est pas passé comme je l’avais tant souhaité. Ayant été détruite le 6 août 1945, par la première bombe atomique, elle a ensuite été reconstruite. On ne retrouve pas à Hiroshima, les traditions qu’il y a à Kyoto. Tout semble neuf et très industriel. De longues colonnes de tours et d’immeubles se suivent et se succèdent à travers les rues. Le seul endroit où l’on peut retrouver l’ancien Hiroshima, c’est dans le parc de la Paix, où l’on peut voir la seule ruine encore présente de cette épreuve.



On a voulu rendre à ce parc, une certaine beauté, mais en regardant ce dôme, monté sur des murs de briques, à moitié tombées, les frissons ont parcouru mon échine. Je ne pouvais qu’imaginer la douleur qu’avaient ressentie ces gens, alors qu’à 8 :14 ce jour du mois d’aout 1945, leur ville était encore celle qu’ils avaient toujours habitée, où ils avaient joué, grandi, travaillé. Ils ne pouvaient s’attendre à toute cette horreur qui, une minute plus tard, ce même jour, allait par la destruction tout changer. Des enfants sont décédés, d’autres n’ont jamais été retrouvés. Les familles ont été décimées, des orphelins parcouraient les rues pour leur survie.
Nous sommes entrés dans le musée de la Paix. J’ai lu et entendu toutes ces histoires d’horreurs qui nous étaient présentées. J’ai vu les restes d’habits calcinés de jeunes enfants et d’adultes et tout cela m’a fait comprendre, que les êtres humains peuvent être d’une grande cruauté. La première bombe atomique était un test, c’était un projet top secret, appelé «Projet Manhattan» qui avait pour but de révéler les dégâts que causerait le nucléaire.

Je suis contente d’avoir vu ce musée; j’ai beaucoup appris sur cette ville marquée par l'Histoire, mais j’ai aussi sur l’être humain, celui qui fait l'Histoire.

10 juin
Ce matin, nous nous sommes levés, nous avons déjeuné et nous sommes allés voir un sanctuaire, l’Itsukushima Shrine. Ce sanctuaire, créé en 593, est construit sur pilotis et lorsque la marée est haute, le sanctuaire se met à flotter. La porte de celui –ci, se trouvant dans l’eau, n’est pas toujours accessible, mais de nombreux visiteurs viennent sur l’île Miyajima pour se faire prendre en photo devant cette porte très célèbre. Ce sanctuaire est composé d’un long corridor de 280 mètres et toute cette structure est peinte en orange. Il est facile de comprendre l’attirance des touristes pour cette île, car une fois dans le bateau, malgré le brouillard qui courait le long des montagnes, on voyait que cette île était d’une grande beauté.

Une fois arrivés sur celle-ci, et en commençant notre marche vers le sanctuaire, nous apercevons de petits cerfs se promenant en liberté. Alors qu’on les dit de nature sauvage, ils venaient frôler nos corps et se faire caresser derrière les oreilles. Ce petit coin de pays paisible et entouré de montagnes suscite chez les explorateurs que nous sommes une grande attirance qui les pousse à le découvrir toujours un peu plus.



J’ai beaucoup aimé ces deux dernières journées, riches en connaissances et en beautés.

PAR SARAH-KIM BOUDREAULT

Après la pluie

Ce matin, une fine pluie fine se détache des nuages imposants qui obscurcissent le ciel d’Hiroshima. Je me rends, accompagnée de mes compagnons de voyage, vers le temple de l’île Miyajima. Sur le pont du traversier, j’entrevois le sommet des montagnes s’engouffrer à travers un brouillard dense. Au loin, des petites maisons dressées à flanc de montagne se révèlent à mon regard flou et enfumé. Cette vision me place immédiatement dans une atmosphère agréablement onirique. Bientôt, je vois l’arche orangée du temple shintoïste se dresser fièrement au centre de l’étendue d’eau. Ce paysage sobre et épuré calme immédiatement les esprits les plus agités. La marée est basse; le temple d’un orange flamboyant qui, habituellement flotte sur la surface de l’eau, repose maintenant sur des pilotis.

Trempés jusqu’aux os par la pluie, les membres du groupe se dirigent vers le restaurant du cousin de Christian. Nous sommes agréablement et très chaleureusement servis dans un décor typique du pays. Tout le monde est ainsi attablé directement sur le sol autour d’une table basse. Frites et rondelles d’oignons défilent, au plus grand bonheur des nostalgiques de la gastronomie québécoise. Crêpe-omelette méli-mélo (voir description du plat mangé hier) à la japonaise et viandes sautés viennent compléter ce gargantuesque repas de rois.



PAR ÉLISE PROVENCHER

Le Souvenir d'une catastrophe

Les habitants d’Hisroshima n’ont pas oublié. Devant le musée de la paix, un groupe de vieillards fait signer une pétition contre l’armement nucléaire. Les arbres autour de moi agitent leurs branches sous une brise humide. Une fontaine crache une eau diaphane en une multiplicité de jets. Un papillon se faufile entre les ruines du « dôme de la bombe A ». La vie, depuis les quelques soixante dernières années, a soulevé les cendres, a essuyé le sang des victimes, a redonné la lumière au ciel. L’épicentre de l’explosion, marqué par une sculpture de béton, est entouré de fleurs dévoilant leurs pétales gorgées de suc. Ces fleurs se sont nourries des larmes et du désespoir d’innocents qui, le 6 août 1945, ont connu une véritable apocalypse.




La première section du Musée de la Paix me plaît. On y relate les grands faits historiques importants en plus de quelques compléments intéressants qui n’avaient pas été abordés dans nos cours d’histoire.

Lorsque je passe à la seconde section, mon visage s’éteint d’un seul coup. Débris de verre et d’ongles déformés, morceaux de vêtements déchirés et calcinés, mèches de cheveux carbonisées constituent une véritable musée de l’épouvante. Les histoires rattachées à chacun de ces objets préservés me donnent le vertige en l’espace de quelques minutes. La vision d’un tricycle grugé par la rouille et le passage des années et celle d’un gamin de trois ans mort sous le choc de l’explosion finissent par m’achever. War is the work of men affiche le panneau commémoratif à la sortie du musée.




Le groupe s’arrête pour manger l’une des spécialités d’Hiroshima. Ce repas difforme composé de choux, de fèves germées, de nouilles, de bacon, d’œuf et d’une crêpe nous est servi directement sur une plaque chauffante. Les goûts et les textures se mélangent en un étrange amalgame dans ma bouche. Ce plat est définitivement au Japon ce que la poutine est au Québec!

PAR ÉLISE PROVENCHER

vendredi 10 juin 2011

Errance nocturne (nouvelle)

Mes yeux écarquillés fixent le plafond de ma chambre à coucher. J’en suis à ma cinquième heure d’insomnie. Au-dessus de ma tête flotte une lumière blafarde qui se répercute timidement sur les quatre murs de bois. De pâles lueurs, comme de véritables spectres, se faufilent dans les recoins ténébreux de la pièce exiguë.

Quatre heures du matin. Tout espoir que Morphée vienne me cueillir délicatement pour me poser dans le creux de ses bras rassurants s’est évaporé tel un rêve flou au petit matin. Je pose le pied à travers les carcasses de mes manuscrits de romans inachevés sur le sol. J’empoigne une veste en sortant et j’erre dans les rues en direction du centre-ville. Une obscurité opaque et surréaliste coule à travers les boutiques que je croise sur mon chemin. Un bourdonnement étouffé se répercute dans les confins de mon esprit et fend le silence excessif qui régnait chez moi il y a quelques minutes. Je finis par déboucher sur la rue Kawaramachi et y poursuis mon errance nocturne. Ici, l’obscurité s’effrite rapidement contre les lumières artificielles et criardes des grands magasins. Mes pupilles se rétractent au contact de cette luminosité qui perce violemment cette nuit d’encre.

Un taxi défile à toute vitesse sur ce grand boulevard rarement aussi désert. Un sillon lumineux poursuit le véhicule comme la trainée poussiéreuse et scintillante d’une étoile filante.
Je m’engage ensuite vers la petite avenue Nikishi. Tout au bout de celle-ci, un roucoulement de pigeon perce le lourd silence. J’avance en étouffant le bruit de mes pas et me camoufle derrière une distributrice de cigarettes pour éviter de me faire voir. Au bout de l’allée, une scène sortie tout droit d’un conte effrayant se déroule sous mes yeux. Une vieille dame assise sur un banc de bois lance violemment des miettes de pain à un pigeon boiteux qui exécute en vitesse des rotations autour de la dame. La volaille volatile semble narguer la vieille femme par son cri moqueur et perçant. Elle piétine, sans y porter la moindre attention, les miettes qui jonchent le sol. Me sentant mal à l’aise d’épier cet étrange événement, je toussote un peu avant de sortir de ma cachette. La dame relève immédiatement la tête. Un sourire se dessine sur son visage froissé et laisse paraître une rangée incomplète de dents carbonisées. On aurait dit les touches d’un vieux piano pourrissant dans le salon d’une maison abandonnée.

Avant que je n’aie le temps de me retourner pour fuir cette femme inquiétante, elle me fait signe de son doigt, pareil à une vieille branche desséchée, de m’approcher d’elle. Je fais plutôt l’inverse en prenant mes jambes à mon cou dans la direction opposée. Je me retourne et la vois, au loin, s’emparer soudainement du pigeon avant de le rouler dans une serviette et de le fourrer dans son sac.

J’aboutis, à bout de souffle, au cœur d’une rue d’un quartier résidentiel. Je me retourne furtivement dans toutes les directions, tel un petit animal craintif, pour m’assurer que je suis bien seul. J’emprunte une avenue étroite et sombre afin de me rediriger vers chez moi. J’aperçois alors, à l’intérieur de l’une des maisons, un éclat brillant qui se répercute dans la noirceur délavée de cette fin de nuit. Inexplicablement attiré par cet éclat, je m’approche de la fenêtre et y vois deux yeux me fixer intensément. Je reste figé là, l’espace d’une minute, à plonger mon regard dans celui de cette inconnue. Une jeune maïko finit pas entrouvrir la porte de la demeure et me fait signe de m’approcher. Son kimono négligemment ceinturé laisse entrevoir sa délicate épaule. Quelques mèches de cheveux aux reflets bleuâtres flottent comme de petits cerfs-volants sous une brise légère. La maïko se rapproche de mon visage et baise ma joue de ses lèvres carmins. Au même moment, elle glisse un petit objet dans la poche de ma veste. Alors que mes paupières sont encore closes, elle ferme la porte coulissante et s’évapore à travers les ténèbres brumeuses qui se faufilent dans sa demeure. Agité par tous ces événements étranges, j’appelle un taxi pour revenir chez moi.

Lorsque je referme la porte de ma chambre, je sors immédiatement le mystérieux cadeau de ma poche. Un petit flacon de vitre contient une luciole agonisante. Une faible lueur verdâtre s’échappe encore faiblement d’entre ses ailes. J’entends, peu après, un grattement contre ma fenêtre. Sur le parapet, est posé un pigeon dont la patte droite supporte un flacon semblable à celui que je viens d’ouvrir. Je libère l’oiseau de son emprise avant qu’il ne s’envole vers l’horizon marqué par la naissance du soleil. Étrange coïncidence : les deux flacons vitrés sont totalement identiques. En les regardant de plus près, j’aperçois qu’un minuscule morceau de papier est roulé à l’intérieur de chacune des bouteilles. Je déroule le premier : Les lueurs de la nuit ne sont qu’illusion alors que le second dévoile Les bourdonnements du silence ne sont que l’écho d’un rêve flou. Les lucioles finissent par s’échapper avant d’envelopper la pièce d’une douce lueur nocturne. Le frottement de leurs pattes crée un écho délicat à l’intérieur des chimères qui se faufilent enfin à travers ma conscience évanouie.

Fin

Par Élise Provencher

Propos en partie inspirés du récit réel de Mathieu Fortier ayant rencontré une femme capturant un pigeon à Kyoto.

La rivière (nouvelle)

Je marche dans cette ville depuis près d’une heure. Arrivée hier, tard dans la nuit, je n’ai ressenti que l’atmosphère magique qui habite cet endroit. Aujourd’hui, je vois Kyoto dans toute sa splendeur.

J’avais besoin de poser mes yeux sur quelque chose de nouveau. La perte de mon emploi et de mon meilleur ami pnt fait en sorte que ma ville natale, celle où je suis née et où j’ai vécu tant de joies et de peines, commençait à m’étouffer et à se refermer tout autour de moi. Je devais partir, m’éloigner, penser, vivre autre chose.

J’hésitais entre partir et aller me reposer sur le bord de la mer, ou découvrir un nouveau pays, ses mœurs et coutumes. En apprendre sur les autres, m’éloigner de moi-même, sortir de moi et découvrir qui sont les autres, oublier qui je suis. Le temps d’un instant, je plongeais dans un rêve où j’étais qu’une observatrice, sans corps ni âme. Je suis juste là, je peux voir, mais je ne peux pas toucher; je peux entendre, mais ne peux pas participer. Je n’ai pas hésité longtemps. Une semaine de repos au soleil aurait tôt fait de baisser la barrière derrière laquelle je me cache depuis peu, pour me ramener aux évènements des dernières semaines. J’ai plutôt choisi de venir me remplir les méninges d’une nouvelle culture et cette ville semble si parfaite. C’est vrai qu’il y a peu de temps que je suis arrivée, mais ces maisons coquettes, typiquement japonaises me font sentir chez moi. Je m’écoule au rythme de ces rivières qui coulent au centre de la ville et qui, pendant l’espace d’un instant, nous attirent à un tel point qu’on voudrait aller s’y baigner, à cause du climat chaud et humide de cette ville.
Je m’arrête un instant, le temps de me prendre un café glacé et vais m’installer sur le bord de l’eau. Un peu plus loin, de jeunes gamins s’amusent dans l’eau peu profonde, et s’arrosent au milieu de leurs éclats de rires. Je les envie d’avoir découvert cet endroit avant moi, de pouvoir, pendant leur jeunesse, profiter de ce petit coin féérique. J’aurais voulu, à cet instant, me retrouver à leur âge, entrer dans l’eau, hésiter l’espace d’un moment par la fraîcheur de ce liquide transparent et me jeter toute habillée, sans me soucier que plus tard, il faudrait que je rentre avec sur moi, ces vêtements rendus inconfortables. J’aimerais posséder encore cette insouciance, ne pas avoir à penser aux moindres détails de ma journée du lendemain. Finalement, je me lève. J’aurais pu prendre une photo d’eux, mais je décide de garder cet instant de bonheur au fond de moi, je n’ai pas envie de le partager.




Je marche en direction de mon hôtel, tranquillement, sans me soucier du temps qui passe à une vitesse effroyable dans ce coin de pays. Je finis par m’arrêter dans un petit restaurant de sushis et je mange en pensant à ma journée de demain. Très chargée! Plusieurs visites de temples sont au programme. J’ai déjà hâte de voir tout ce qui m’attend, j’ai l’impression que la moindre petite chose m’émerveille.

Un peu plus tard, je me couche en pensant que cette destination était mon meilleur choix depuis plusieurs semaine et que mon voyage sera réussi. Rien ni personne ne réussira à le troubler.

Par Sarah-Kim BOUDREAULT

jeudi 9 juin 2011

Quelques photos

Je vous invite à revoir quelques chroniques précédemment publiées: des photos pour le moins éloquentes ont été ajoutée, notamment trois de nos voyageuses maquillées et vêtues en geiko.

Jocelyn

Le Secret le mieux gardé du Japon

Kyoto – 7 juin 2011

Je ne cesse de rester bouche bée en constatant le raffinement japonais. Alors que dans un billet précédent je parlais d’hôtesses de l’air croisées à l’aéroport qui avaient particulièrement de la classe, plusieurs éléments témoignant d’une minutie délicate ont attiré mon regard, entre autres lorsque nous avons visité la demeure d’une dame qui nous a offert la cérémonie du thé, ou encore celle des beaux-parents de Christian. Là bas, on observe des tatamis de bambou, des sofas à motifs fleuris, des tapis à motifs herbeux, des boîtes de papiers-mouchoirs couvertes de fleurs, des cadres délicats, de la vaisselle magnifique et des murs, des plafonds et des rideaux texturés. Que ce soit lors de la cérémonie du thé, lors du dîner ou dans divers petits cafés japonais, je suis absorbée par les tasses qui sont parfois fleuries, parfois ornées de motifs d’animaux, parfois métalliques et certaines fois même incrustées de morceaux de coquillages.

De là, je me suis questionnée sur l’apport de la tradition à ce raffinement typiquement japonais. Les Japonais semblent réussir de façon étonnante à intégrer les traditions à leur mode de vie moderne. Par exemple, le kimono n’est pas un habillement réservé aux cérémonies traditionnelles; il peut être porté même dans la rue, pour toutes les circonstances de la vie quotidienne. Également, beaucoup vont utiliser des éventails lors des journées chaudes.
Aussi, les Japonais ont réussi à préserver plusieurs éléments culturels traditionnels importants, comme la cérémonie du thé et le concept de la Maiko ou Geiko. Un autre élément très intéressant que j’ai pu observer est la fréquentation des temples. Plusieurs jeunes Japonais vont faire leur jogging dans ces lieux sacrés remplis de verdure. Il ne faut également pas oublier que les villes abondent de restaurants typiquement japonais et de petits éléments qu’on peut associer uniquement à la culture japonaise. On ne sent pas que le Japon a subi une véritable américanisation.




Le calme des Japonais est quelque chose qui me marque énormément aussi. Ils travaillent six jours par semaine et vivent à un rythme inimaginable, mais presque jamais on ne les voit courir pour prendre le train ou pour traverser la rue et ils prennent le temps de prendre le thé et d’effectuer toute tâche avec qualité et minutie. Leur secret pour la réussite de l’intégration des traditions à un mode de vie moderne reste inconnu. Et moi je tâcherai de continuer l’analyse de ce phénomène!
Bientôt nous irons au musée de la bombe à Hiroshima! J’ai si hâte!

PAR LAURA PELLETIER

Les Petites sardines salées

Jade, Myriam-Sophie et moi nous rendons ce matin dans un studio d’une petite rue calme afin de vivre une véritable transformation…

Première étape : nous nous dirigeons, après nous être vêtues d’un sous-vêtement spécial, à la salle de maquillage. Un pinceau enduit d’un liquide blanc et froid parcours le haut de mon dos avant de remonter vers mon cou et, enfin, l’ensemble de mon visage. Des particules de poudre viennent ensuite caresser l’ensemble de mes joues. Quelques traits de crayons rouges et noirs viennent souligner mon regard. Mes lèvres sont finalement enduites d’un fard carmin. Second étape : une lourde perruque noire accessoirisée de fioritures colorées est posée sur ma tête. Dernière étape: c’est le moment de revêtir le kimono. Je suis enroulée, tel un morceau de saumon dans le riz d’un maki, dans une quantité inimaginable de serviettes et de couches de vêtements. Petit jupon, serviette, bandelette, serviette, eton serre le tout à l’aide de corde, serviette, bandelette, petit harnais aux épaules, kimono, bandelettes, kimono, ceinture, bandelette, cordelette. Me voilà enfin en véritable geiko! Je retiens mon souffle, il ne reste plus qu’à poser pour la caméra.




Je passe l’après-midi à errer à travers Kyoto. Jade et moi traversons un marché animé du centre-ville. Une forte odeur de poisson me frappe au premier abord et me donne un léger mal de cœur. Autour de moi défilent des étalages d’aliments informes et de masses non-identifiables. Des poissons morts me fixent de leurs petits yeux écarquillés. La chaleur causée par la cuisson des aliments crée une atmosphère oppressante. Ici, les odeurs, les couleurs et les textures créent un amalgame étourdissant qui m’est complètement inconnu. C’est ici, au cœur d’un marché, que la différence me surprend et me plonge dans un vertige. Le choc culturel passe alors à travers un paquet de petites sardines salées.

PAR ÉLISE PROVENCHER

Kyoto comme un rêve

Nous nous sommes réveillés plut tôt, car aujourd’hui c’était la cérémonie de thé. Vers onze heures, nous nous sommes rendus chez cette dame qui nous a reçus, tous ensemble, dans son salon, pour nous montrer comment se déroulait la traditionnelle cérémonie du thé. Assis tous ensemble, un peu coincés mais heureux d’être là, nous regardions Haruka, la belle-sœur de Christian, préparer le thé, pendant que cette gentille dame nous servait à chacun une tasse différente, choisie pour chacun de nous, un peu en fonction de ce que nous sommes. Elle, ainsi que sa famille avant elle, sont des maîtres de cet art. De génération en génération, ils se sont transmis cette tradition si propre au Japon.

À la suite de cette cérémonie, elle nous a décrit et montré les objets dont elle avait besoin pour faire le thé, dont une cuillère de bois, faite par le grand-père à partir du bois d’un arbre qui venait de sa cour. Tous ces objets sont précieux et sont choisis selon leur lien d’appartenance avec la saison. La conscience des saisons est très présente au Japon, et souvent des éléments de la vie quotidienne sont choisis de manière à faire un lien avec la saison en cours. Par exemple lorsque nous sommes allés voir la Maiko, elle avait dans sa coiffure une sorte de fleur que l’on retrouve seulement à cette époque de l’année. Tout élément découle d’un choix lumineux.

On dirait que dans ce pays du soleil levant, tout doit être parfait et choisi pour le mieux. Les rues sont étonnamment propres; on ne voit que très rarement des déchets au milieu de la rue, alors qu’à Montréal, il y en a énormément et nous sommes une population moins nombreuse qu’au Japon.




Dans l’après-midi, nous avons visité trois temples splendides. On dirait que plus je passe de temps à Kyoto, plus j’ai l’impression d’être dans une bulle de bonheur qui se referme tranquillement autour de moi et qu’à la fin, lorque je vais devoir en sortir, je vais laisser une partie de moi dans cette ville enchanteresse.




PAR SARAH-KIM BOUDREAULT

mercredi 8 juin 2011

Note de l'éditeur au sujet des photos

Vous ressentez fort possiblement une vive impatience à l'idée de voir de nouvelles photos apparaître dans l'album. Il semble impossible aux étudiants, depuis qu'ils sont à Kyoto, de transférer leurs photos. Chaque tentative s'est avérée un échec.

Le problème devrait se corriger éventuellement.

Les Dessous du Japon: les masques

Shibuya, Tokyo. 3 juin. 11h02

Nous avons remarqué, depuis le début de notre voyage, que plusieurs personnes, en public, portent des masques hygiéniques (du genre de ceux des dentistes ou des chirurgiens).

Notre hypothèse : Les Japonais sont tellement nombreux dans les lieux publics qu’ils portent des masques pour éviter d’être contaminés par les germes des autres.

Notre verdict : Après enquête, nous nous sommes rendues compte qu’il s’agissait du contraire : lorsqu’ils sont malades, les Japonais portent des masques, par respect, pour éviter de transmettre leurs microbes.

Par Miryam-Sophie et Catherine

Le moment du thé

La cérémonie du thé se révéla être une expérience sensorielle extraordinaire. Bien entendu, les papilles gustatives sont stimulées lorsque la matière verte et opaque entreprend sa descente dans mon eusophage. Un petit goût amer qui n’est pas du tout désagréable me surprend à la première gorgée et me charme totalement à la dernière. Mes yeux restent également accrochés aux moindres mouvements de Haruka, la belle-sœur de Christian, qui nous prépare le thé. Ses gestes lents et précis me permettent de profiter à chaque instant de la beauté de ce moment complexe et sacré. Le bol de thé que je fais tournoyer dans la paume de ma main affiche une véritable petite histoire avec la série de personnages aux couleurs flamboyantes qui y sont dessinés.

Les petits gâteaux d’un vert frais ont l’effet de cristaux émiettés sous ma langue. Un bonbon rugueux fond lentement à l’intérieur de mes joues. Les saveurs et textures nouvelles s’entrelacent dans une explosion de sensations jusque là inconnues. Ce moment, cette cérémonie restera à tout jamais unique. En effet, il est impossible de répéter la même cérémonie plus d’une fois d’une fois. Assurément, la prochaine fois serait différente. Tous les éléments, le décor, la couleur des kimonos, les douceurs servies, sont choisis en fonction du groupe reçu et de la période de l’année. La couleur dominante de notre cérémonie est le vert frais qui renvoie aux feuilles des arbres à ce moment du printemps. Je me sens immédiatement privilégiée d’avoir vécu un moment singulier qui restera gravé seulement dans treize esprits émerveillés.




Le groupe termine sa journée par la visite de deux temples en pleine nature. Les arbres crochus donnent à la forêt dense et sombre un aspect quelque peu effrayant. De nombreuses statues de pierres recouvertes de mousses et effritées par le passage du temps prennent l’aspect de véritables pierres tombales au centre des arbres squelettiques. Espérons seulement que l’esprit obscur de cette forêt ne viendra pas hanter mes rêves ce soir.

PAR ÉLISE PROVENCHER

De plus en plus zen

Ce matin, le réveille-matin nous a permis de dormir autant qu’on le voulait; personne n’est venu nous réveiller pour nous dire de nous lever, c’est le soleil qui a glissé sur nos visages pour nous prévenir qu’il était l’heure.

Aujourd’hui encore, nous avons fait la visite de deux magnifiques temples. Le Ginkakuji Temple est le premier que nous avons visité. Dès l’entrée, un jardin de pierre, nous était présenté. Les Japonais semblent avoir le besoin de se soucier des moindres détails. Cette mer de pierres était raclée de sorte que l’on pouvait imaginer se retrouver devant de l’eau, avec certaines places où les pierres étaient plus hautes, de façon à démontrer les vagues. Tous les détails étaient définis de sorte qu’il était facile d’imaginer ce qu’on nous représentait. Une fois notre contemplation faite, nous pouvions, à travers divers chemins, nous retrouver dans la montagne et la forêt. Le fait que la nature soit si magnifique, naturelle, nous interpelle. Ici la nature nous rappelle à quel point elle peut être réconfortante, zen, et qu’elle nous permet de nous questionner sur nous-mêmes, de voir certains aspects d’un nouvel œil.

C’est le passage devant plusieurs boutiques et surtout les questions de Japonais avides d’apprendre l’anglais qui m’ont arrachée à ma rêverie.

Kiyomizu est le deuxième temple que nous sommes allés voir durant la journée. Pour y parvenir, nous avons littéralement escaladé une rue pour enfin arriver à cette merveille qui nous a permis d’observer la ville de Kyoto dans toute sa splendeur.

L’ambiance au Japon, me donne envie d’y vivre. À tout moment de la journée, nous rencontrons des gens qui, même s’ils ne nous connaissent pas et qu’ils ne savent rien de nous, nous sourient, peu importe leur âge. Ils font en sorte que l’on se sente chez soi. Ce qui nous fait sentir le plus étranger, c’est tous ces temples et toutes ces traditions que l’on retrouve ici et qu’on ne voit pas ailleurs. Les forêts sont superbes, elles donnent envie de s’y perdre.
Je sens que je m’attache à ce pays magnifique et que lorsqu’il va falloir lui dire au revoir, je vais avoir un intense regret à le quitter.

PAR SARAH-KIM BOUDREAULT

mardi 7 juin 2011

La maiko

Le réveil est plutôt difficile après une courte nuit de sommeil. Le groupe se rend, ce matin, au temple Ginkakuji. Je suis complètement éblouie par la beauté de l’endroit. La lumière du matin se reflète par endroits sur la mousse veloutée et humide à travers les arbres. Des reflets dorés viennent sublimer ce vaste tapis verdoyant. Je n’arrive pas à croire que j’appartiens à ce monde digne d’un vrai conte de fées. Les branches tordues des arbres à l’aspect torturé créent un contraste fascinant à travers cette perfection dans une nature extrêmement contrôlée. Les hautes montagnes feuillues ont l’effet d’une caresse sur mon esprit souvent trop agité.

L’autre moment clé de la journée constitue en la visite chez la maiko. La maiko est une apprentie geisha. Le terme utilisé au Japon est plutôt « geiko » en raison de la connotation péjorative et sexuelle du mot « geisha ». La jeune femme pratique donc de nombreuses formes d’arts japonais dans l’intention de devenir une hôtesse raffinée auprès des clients aisés. Je reste admirative devant cette jeune femme de vocation d’à peine dix-neuf ans qui suit sa formation depuis l’âge de quinze ans. Je deviens immédiatement verte de jalousie devant cette beauté pure et sereine qui semble, malgré son jeune âge, emplie de sagesse. Son visage immaculé d’une lisse poudre lui confère une attitude paradoxalement très froide et envoûtante. Cette maiko, qui dévoue sa vie pour son art, nous exécute, à la fin de la rencontre, une danse inspirée du théâtre nô (un théâtre de geste, de facture traditionnelle et folklorique et caractérisé par des costumes flamboyants.) Ses gestes délicats et précis sont observés et suivis par mes grands yeux écarquillés. Les pans soyeux de son kimono fleuris ondulent légèrement à chacun de ses grands gestes fluides.


La journée se termine autour d’un bar à sushis dont les nombreux plats défilent devant nous sur un tapis roulant. Nous partageons le repas en riant, autour de sashimis et d’un très mauvais vin.

PAR ÉLISE PROVENCHER

Les Dessous du Japon: les toilettes

Toilettes des femmes, Tokyo Central youth hostel, Tokyo, 2 juin. 20h10.

Rarement les toilettes n’auront été autant au service de leurs utilisateurs ! On peut le dire, nos toilettes sont beaucoup moins performantes. À Tokyo, les toilettes Toto sont multifonctionnelles, offrant diverses options : siège chauffant, bidet optionnel, température de l’eau ajustable, musique « flushing sound » pour les plus timides, désodorisant puissant, intensité du « flushage » réglable, etc. Tout est conçu pour assurer le confort de notre postérieur et le bon déroulement de la procédure d’évacuation.

Notre Hypothèse : Les Japonais accordent une importance spéciale à leur hygiène digestive et puisqu’ils sont de nature réservée, ils ont besoin de détente pour s’adonner à la satisfaction des besoins naturels.

Nos preuves : Le papier hygiénique délicat et les portes des cabines gigantesques.

Bien que pouvant sembler superflues, ces options sont toutefois rapidement appréciées et nous ne verrions aucun inconvénient à importer ce modèle de toilettes chez nous.

PAR MYRIAM-SOPHIE ET CATHERINE

lundi 6 juin 2011

Chronique gastronomique

Après avoir visité un temple en or, quoi de mieux qu'une bonne soupe de udon! Nous sommes allés manger dans un petit restaurant qui m'a semblé très connu ici, à Kyoto, car il figure dans deux revues japonaises et plusieurs clients auraient aimé venir y manger si nous n’avions pas occupé toute la place.

La serveuse (surement l'unique sur les lieux) qui nous a servi, et qui devait être la propriétaire, était une gentille vieille petite dame très en forme. Elle semblait heureuse d'avoir des clients occidentaux. La place nous donnait l’impression de nous trouver carrément chez elle, dans sa demeure, ce qui créait une belle atmosphère.

Le plat principal de la place était une soupe- repas aux pâtes de udon. Deux choix de soupes étaient offerts : celle avec du tofu ou celles avec toutes sortes d’ingrédients. Les nouilles étaient parfaitement cuites, le bouillon avait un petit gout sucré agréable.

J’ai choisi celle au tofu et bien apprécié la façon avec laquelle il avait été frit. Peut-être aurais-je apprécié qu'il y en ait plus en rapport aux nouille, mais non, la soupe était excellente. Le goût était bien ajusté.

Il y a longtemps que ces restaurateurs cuisinent ce repas, et leurs clients semblent fidèles à l'endroit. J'ai bien aimé l'expérience.

XXX

PAR JADE ST-ARNAUD

Contemplation du Rokuon-Ji temple

4 juin (journée de déplacement)

Nous sommes arrivés depuis seulement quelques heures à Kyoto, la fatigue prend le dessus sur nos esprits, depuis que nous avons vu les futons sur lesquels nous tomberons dans les bras de Morphée, seulement quelques heures plus tard. Un souper sensationnel nous attendait. Même si je ne suis pas grande amateure de porc, celui qu’on nous a servi était sensationnel! Panné et d’une cuisson exquise, il était renversant. Malgré cette bonne nourriture, le sommeil m’a rattrapé d’un coup, dès le moment où ma tête a touché l’oreiller.

5 juin, première journée à Kyoto


Notre première journée dans cette ville commence avec un temps humide et chaud. Marchant d’un bon pas, nous nous dirigeons vers l’arrêt d’autobus, qui nous amènera vers le Pavillon d’or, ou plus communément appelé le Rokuon-Ji Temple, en japonais. C’était le premier temple que nous allions visiter. Le pavillon d’or est cet endroit où l’on se retrouve émerveillé, autant devant la splendeur tranditionnelle que par l’atmosphère de l'endroit. J’aurais voulu que ce soit chez moi. Dans la nature, à travers quelques bois, nous pouvons apercevoir quelques parcelles de ce temple, mais des arbres on été placés de sorte que nous ne puissions le voir au complet. Un suspense de forme dans nos esprits; on progresse avec l’envie de le voir toujours un peu plus. Nous arrivons finalement, face à lui, et pouvons le contempler dans toute sa splendeur. Séparé de nous par un lac, il nous est inaccessible, mais c’est cette inaccessibilité, qui le rend encore plus magnifique. Temple bouddhiste, il a, à plusieurs reprises, été incendié, par certaines personnes trouvaient sa beauté d’une trop grande envergure.

Les trois étages de ce temple, ont été conçus à trois époques différentes, ce qui en fait un temple architecturalement chargé d’histoire. Le premier étage a été fait dans le style des palais de l’époque Heian; le deuxième a le style des maisons des samouraïs; et le troisième se rapporte à l’époque des temples Zen.

Le temple était au départ la maison d’un aristocrate. C’est par la suite qu’il est devenu ce qu’il a été pendant de nombreuses années, avant d’être relégué au rang d’attrait touristique pour les nombreux voyageurs qui ont foulé les chemins entourant ce temple. Une forêt abrie les lieux de sa beauté; toutes les pierres sont placées de belle façon. Moi j’ai envie de m’y établir, d’y vivre, ou d’y rester un moment pour atteindre le calme et la splendeur; pour m’asseoir et contempler la nature, tout en écoutant le silence, brisé par le chant des oiseaux.

Pendant cette journée, nous sommes aussi allés visiter le Ryoanji temple, un temple avec un jardin de pierre, mais celui-ci ne ma pas autant parlé et touchée, comme l’a fait le Rokuon-Ji temple.

PAR SARAH-KIM BOUDREAULT

La nature est un temple

Moi qui pensais préférer Tokyo à Kyoto, me voilà foudroyée par la beauté de cette dernière. En entrant dans la ville, l’autobus traverse un boulevard animé comparable à la promenade de la rue St-Hubert. À moins de dix minutes de là se trouve notre auberge qui consiste en une maison traditionnelle japonaise. Un petit ruisseau se faufile timidement au travers de la rue paisible. Des herbes folles viennent doucement caresser le rivage de ce mignon cours d’eau bordé de feuillus saules pleureurs. Alors que je me trouvais au cœur d’une grande ville animée il y a quelques minutes, je suis soudainement devant une maison typique du Japon qui aurait pu se retrouver sur le chemin d’une petite campagne pittoresque.




Au sujet des contradictions d’ailleurs, tout le groupe a eu l’occasion de faire la visite de deux temples au cours de la journée. Rien à voir avec Tokyo et ses buildings, aux affiches criardes, qui cherchent à percer les nuages. Ici, j’assiste à un retour des traditions lorsque je croise des dames vêtues de sublimes kimonos sur mon chemin vers le temple et le jardin zen.
Premier arrêt : le Pavillon d’Or. Une rangée d’arbres bien touffus me cache la vue du temple bouddhiste à l’entrée du sanctuaire. En avançant sur un sentier de pierre, je perçois la merveille qui finit par se révéler timidement à moi. La voilà enfin, brillant de mille feux par sa laque dorée dont elle est enduite. Le pavillon est entouré d’un lac calme où fleurissent des nénuphars. Les pétales rosés se balancent délicatement au passage des carpes sacrées qui agitent leurs babines au-dessus de l’eau.

Second arrêt : le jardin de pierres zen. Ce dernier est composé d’îlots qui comptent un total de quinze rochers baignant dans une étendue de gravier parfaitement ratissée. Cette simplicité m’emplit d’un certain calme après les journées chargées que je viens de passer. Ici, la nature cherche à recréer un microcosme. La nature est ainsi reproduite par… la nature. Les rochers habillés de mousse semblent être de véritables îles flottant au cœur d’une mer dessinée par les stries ondulées du râteau à travers le gravier. Par ailleurs, même si l’on compte quinze roches, il n’est possible que d’en voir quatorze à la fois. Peu importe l’angle où je me place, l’une d’elle échappe constamment à mon regard. Cette disposition calculée pourrait bien refléter l’esprit méthodique et affuté des Japonais. La pierre invisible semble être, pour plusieurs, la métaphore des sens humains faibles et réduits. La vue ne nous permet pas de percevoir toute la réalité qui nous entoure. Une partie de celle-ci nous échappe; nous n’avons que très peu conscience de l’ensemble des phénomènes qui nous entourent réellement.




Je quitte ainsi ce lieu d’une simplicité magnifique en me faisant demander pour la cinquième fois de la journée de prendre une photo avec un groupe de jeunes lycéennes. Je me sens soudainement comme une étrange curiosité…

PAR ÉLISE PROVENCHER

Les Dessous du Japon: Les policiers

Aéroport de Narita. 2 juin. 17h37, heure du Japon.

Dès nos premiers instants en terre étrangère nous avons été soumises au système de sécurité exceptionnel des Japonais. Vérification et tamponnage des visas, prise de photos, d’empreintes digitales… L’accueil a pris une toute autre couleur lors de notre rencontre fortuite avec des policiers, qui faisaient une vérification aléatoire des passeports. À notre évidente surprise, les policiers se sont avérés sympathiques, affables, gentils, souriants, hospitaliers, amicaux, respectueux, joviaux, humbles, agréables, courtois, accueillants, avenants, etc. Nous sommes bien loin de notre Québec natal.

Pourquoi leur comportement diffère-t-il autant de celui de nos « agents de la paix » ? Nous nous sommes posé la question.

Notre hypothèse : Étant de nature réservée, ils ont opté pour une approche positive à l’égard de touristes.

Le verdict : Nous avons recueilli un témoignage d’un individu du nom de M. B qui nous a affirmé connaître la raison de ce comportement : «On sent, chez les travailleurs des services publics, qu’il y a une conscience d’être redevables aux contribuables. Le service est toujours souriant et efficace.».

Il nous semble que cette conscience ne soit pas aussi fervente au Québec.

PAR MYRIAM-SOPHIE ET CATHERINE

Présentation de Myriam-Sophie Deslauriers

Les arts et la culture en général ont toujours, il me semble, constitué un besoin, que dis-je, une nécessité liée au bon fonctionnement de mon système. Bien que ressentant un intérêt profond pour toutes les formes d’arts – arts visuels, littérature, musique – c’est le théâtre qui, dès l’enfance, m’a captivée au point de vouloir en faire un métier. Je demeure néanmoins on ne peut plus fascinée par la plupart des autres disciplines artistiques : j’ai tendance à démontrer un brin d’hystérie lorsqu’on mentionne devant moi la plupart des groupes de rock des années 1960 et 1970, en particulier les Beatles et tout ce qui se rattache aux Beatles, et ce, depuis un tout jeune âge. Je me dois également de mentionner, à titre d’hommage, mon amour profond, mais malheureusement à sens unique pour Marlon Brando, Brad Pitt et Robert Redford (et, par le fait même, pour la quasi-totalité de leur œuvre).

Je ne me rappelle pas d’avoir un jour ponctuellement développé un intérêt pour les voyages et les cultures étrangères, il me semble que c’est une passion que j’ai toujours eue. Peut-être est-ce ce besoin de m’évader -- que petite, j’assouvissais par le biais de la littérature alors que je rêvais d’accéder à la plateforme 9¾; ou que j’aurais tout donné pour voir la Bavière de ma bien-aimée Sissi; ou lorsque j’aspirais à me créer mon propre Club des cinq -- qui me pousse aujourd’hui à vouloir découvrir de nouvelles contrées. Depuis ma Gaspésie natale, j’ai eu la chance de parcourir bien des pays, mais je décerne à l’Asie une place toute particulière : cette culture, par sa différence, m’attire autant qu’elle m’effraie, et je remercie Christian Braën, Guy Bourbonnais ainsi que tous mes compagnons de voyage de bien vouloir partager cette expérience unique avec moi. Le Japon est un pays qui m’a été présenté par Murakami, et j’espère à mon tour, par le biais de ce blogue, pouvoir vous transmettre un peu l’essence de notre aventure et de ce pays.

Myriam-Sophie

dimanche 5 juin 2011

Les Dessous du Japon: Myriam-Sophie et Catherine enquêtent

Tokyo, Japon. Heure indéfinie (décalage trop important).

Alors que nos bien aimés compagnons se contentent de découvrir le Japon d’un œil naïf, nous, jeunes professionnelles perspicaces et à l’affut, voulons percer les mystères du pays au soleil levant. Sous la couverture de touristes, il nous est plus facile d’étudier les particularités du Japon pour ensuite vous les dévoiler. Nous gardons l’œil ouvert.

Vous pourrez lire chaque jour nos notes d'enquête.

À votre service

Myriam-Sophie et Catherine

De Tokyo à Kyoto

4 juin 2011 – 21h15 –



Lorsqu’on arrive au Japon, une chose en particulier est terriblement marquante : l’argent investi dans les transports en commun. Tout semble propre et technologique. À la gare, un grand de trains rapides parcourent le Japon en entier (ou presque). De plus, le système de fonctionnement des autobus est vraiment efficace : on y entre par en arrière et on paye en sortant. Ainsi, pas d’engorgement en avant du bus! MIRACLE. Disons que j’éviterai de mentionner à quoi ressemble notre système de transport en commun lorsque je discuterai avec des Japonais…





PAR LAURA PELLETIER

3 juin le soir - Promiscuité et pancakes

Le hautparleur du train bondé crache une mélodie légère et cocasse. Je suis littéralement prise en sardine entre deux inconnus. Malgré la masse de gens comprimés dans un endroit si restreint, un étrange calme règne dans tout le wagon. Je n’entends quasiment que les cliquetis du cellulaire de l’homme devant moi qui s’affaire à « texter » depuis au moins quinze minutes. Ce silence excessif me trouble d’abord et finit par m’apaiser. La notion de respect de l’autre me semble primordiale chez les Japonais.

Tous, écoliers comme travailleurs, se placent en ligne bien droite en attendant le train, scène de courtoisie sociale impensable à la station Berri-Uqam! Tout semble naturellement ordonné et pratique afin de faciliter les rapports entre tout un chacun. Malgré tout, je ressens une certaine froideur et un manque d’authenticité dans leur façon distante de communiquer. Ce comportement, qui leur confère parfois une attitude que l’on pourrait parfois qualifier de « coincée », est pourtant nécessaire dans un endroit où chaque personne n’a que la possibilité de vivre et d’agir dans un espace exigu. Occidentaux rustres et égocentriques s’abstenir.
Nous entrons à l’hôtel ce soir-là après l’heure du couvre-feu. Le réceptionniste vient nous chercher au pied de l’édifice et nous mène devant une petite porte dans un recoin de l’édifice. Près de notre groupe, deux jeunes hommes ivres se roulent littéralement sur l’asphalte tels deux vers de terre chassés de leur nid un jour de pluie. La bande pénètre, à la queue leu leu, dans un étroit et sombre escalier de service. Nous débouchons sur un long corridor exigu et tortueux. Une faible lueur se répercute dans l’ombre opaque qui s’écoule dans les recoins inquiétants du couloir. Ce lieu, accentué par l’effet de ma fatigue, me semble appartenir à un monde quelque peu irréaliste. Je m’y laisse guider aveuglément en tentant de lutter contre le sommeil à travers ce véritable dédale ténébreux.

« Cette situation te fait penser à quoi?, me demande Christian le lendemain.
-Hmm un film d’action? James Bond?
-Une autre idée?
-Bien sûr! Murakami! »

Je repense immédiatement au narrateur de la nouvelle « Le petit grèbe » du recueil Saules aveugles, femme endormie, coincé dans les confins d’un corridor infini et labyrinthique. Je revois également le personnage de Toru Okada, tiré du roman Chroniques de l’oiseau à ressort, poursuivant une quête onirique à travers les couloirs animés d’une force fantastique d’un hôtel de Tokyo. Cette situation, qui m’a d’abord parue banale, se révèle maintenant dans mes souvenirs comme singulière et énigmatique.

PAR ÉLISE PROVENCHER

Note aux lecteurs

Chers lecteurs,

Dans la colonne de droite, vous remarquerez un diaporama. Il est alimenté par les photos prises par les étudiants au cours de leur odyssée. Cet album sera mis à jour quotidiennement.

Si vous souhaitez voir l'intégralité des photos, il vous suffit de cliquer sur le diaporama.

Bonne lecture!

samedi 4 juin 2011

Des voyageurs affamés de découvertes

On a cogné à notre porte, personne ne bouge : nous ne sommes pas encore remis de notre décalage. Ça recommence, je me lève et vais voir. Il est temps de se lever, un déjeuner nous attend à seulement quelques pas de notre chambre. Après avoir freiné notre fringale, nous sommes partis conquérir la ville de Tokyo, grande ville qui peut être comparée à la ville de la grosse pomme. De gros gratte-ciels imposent leur stature autour de nous, faisant de l’ombre à ceux qui tentent, pendant quelques minutes, de fuir cette sphère de feu, qui nous avait suivis.

Laissés libres, le temps que l’horloge n'entame un tour complet, nous avons pu nous promener dans une rue de Tokyo, où se trouvaient de nombreuses boutiques. Élise et moi avons trouvé très amusants les quelques articles d’un magasin, souvent très mignons ou encore très loufoques. Les peluches en forme de pointe de pizza côtoyaient les arachides. Une suce pour bébé, qui une fois à l’intérieur de la bouche, nous offrait une tout autre vue de cette bouche de gamin. Parfois elle avait l’allure d’un monstre, ou d’une bouche pulpeuse de jeune femme.

Au cours des quelques premières heures de notre périple en terre du pays du soleil levant, nous avons pu constater que les Japonais exhibaient quelques extravagance, tels que de petits objets accrochés aux téléphones, qui de différentes tailles et couleurs, attirent l’œil. Tout le monde en a au moins un, qui souvent prend la forme de petits toutous en forme d’ours.

Pour cette journée du 3 juin, la station Shinjuku a été notre point départ vers la découverte de cette ville immense, où il y a toujours des flots incessant de gens qui traversent les rues et des automobiles, toujours plus extravagantes les unes que les autres. Des taxis noirs, turquoise et jaunes s’imposent dans cet univers de carcasses métalliques.

Nous avons entrepris de découvrir cette ville remplie de monstres de béton, nous avons marché à travers différents artères de la ville, pour nous rendre compte que cette ville n’est pas si différente de celles que nous connaissons, à l’exception du fait que la plupart du temps, nous ne comprenons pas les indications; il est si rare de ne pas reconnaître les signes qui nous parlent dans une ville.

En fin d’après-midi, un petit café nous a accueillis, où nous sommes assis pour parler de tout et de rien. Cette scène m’a laissé croire que nous aurions pu être à Montréal, entre amis, pendant une belle journée ensoleillée.

Une deuxième journée passée dans ce pays, donc. Je ne me sens pas trop dépaysée pour le moment, mais demain, c’est Kyoto, une nouvelle ville qui nous attend, vers laquelle nous irons, pour continuer ce périple qui ne vient que de commencer.

PAR SARAH-KIM BOUDREAULT

Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil

Tokyo – 3 juin 2011 – 18h55




En arrière-scène du spectacle Koozà du Cirque du Soleil. Punching bag, costumes à moitié mis, poutre, habilleuses, altères, coiffeuse, éléments de décor accrochés, vélo stationnaire, tapis … l’ambiance est étrangement relax dans cette salle transformée en gymnase : des acrobates russes jouent au Black Diamond, des contorsionnistes chinoises s’étirent tout en pratiquant leur chorégraphie, des clowns français ou anglais taquinent les techniciens, une trapéziste s’exerce sur son vélo stationnaire, un mono cycliste répète son numéro et des funambules courent sur un fil de fer tout en sautant et en rigolant. Les divers artistes de cirque montrent une belle chimie de groupe et on voit qu’ils sont tous très heureux d’être là. Le spectacle commence avec un 10 minutes d’animation pendant lesquelles les tous pratiquent, s’échauffant au maximum.




Quelques poignées de mains amusantes sont échangées entre les artistes, puis l’animation se termine. Les acrobates qui pratiquaient leur numéro il y a quelques minutes dans cette sorte de gymnase sont maintenant sur scène en train de le performer devant public. Ils reviennent tous dans leur lieu de pratique quelques minutes plus tard pour se changer, s’étirer ou mettre de la glace sur les blessures. D’autres performeurs restent zen, ne participant qu’à la deuxième partie du spectacle, ou dorment en attendant que leur tour vienne un peu plus tard dans la première partie. Pendant ce temps, trois contorsionnistes dansent sur un disque tournant, alliant force et souplesse. On observe l’arrivée de nouveaux être musclés dans ce simili-gymnase: plusieurs acrobates russes et une femme. Un couple pratique des portées et les hommes forts et agiles tentent de réussir une pyramide difficile. Après quelque trois essais, ils réussissent et quelques minutes plus tard, c’est sur scène qu’ils la réussiront sans avoir droit à l’erreur. On entre, on sort, on change de costume ou on leur fait des retouches. Les entraîneurs sont présents. Tout doit être parfait. Le spectacle se termine. Tout le monde semble soulagé et prêt, à fêter. Ce fût une expérience mémorable de voir les coulisses du Cirque du Soleil, à l’autre bout du monde!


PAR LAURA PELLETIER

HELLO TOKYO!

Aujourd’hui, premier contact avec la ville de Tokyo. À la sortie de la gare de Shinjuku, je me plonge immédiatement dans la vague de Tokyoïtes encadrés de buildings venant presque effleurer le ciel couvert de smog de la ville. Les tours s’entassent à perte de vue; aucune trace de végétation n’est présente à travers cette masse bétonnée et vitrée. Je lève les yeux. Sur un écran géant se dandine sur un rythme chargé de tous les clichés musicaux la chanteuse pop de l’heure. Des néons et des publicités aux couleurs criardes viennent compléter le décor déstabilisant de cette grande ville.

Nous nous rendons directement dans le quartier de Harajuku, véritable paradis du bidule, du « cossin », de la « bébelle ». Les fameuses Harajuku girls, ces jeunes filles reconnues pour leurs vêtements excentriques et très colorés, se font rare à cette heure de l’après-midi en pleine semaine. J’ai tout de même eu l’occasion de croiser quelques énergumènes aux parures singulières et insolites lors de ma découverte du quartier. Sarah et moi faisons le tour des boutiques aux carrelages roses bonbon et aux murs tapissés de vêtements et de peluches kawaii. J’ai alors l’impression de me retrouver dans une véritable maison de poupée. Je m’attends presque à voir débarquer à tout moment une décapotable fushia de plastique pour me ramener à l’hôtel. À mon plus grand bonheur, je découvre une petite boutique vintage que Giulia m’avait indiquée. Devrais-je craquer…?

Durant la soirée, le groupe a la chance extraordinaire d’assister au spectacle Kooza, une production du Cirque du Soleil présentement en tournée à travers le Japon. Grâce aux contacts de Charlotte avec l’une des musiciennes, j’ai l’occasion, avec quatre de mes compagnons, d’assister aux préparatifs de la présentation dans l’arrière-scène. Ici, je me sens au plein cœur d’une véritable tour de Babel. Des acrobates russes se font une partie de baggamon à quelques minutes de la présentation. Deux Sud-Américains piquent un petit somme après leur numéro. Quelques clowns américains viennent se dandiner devant les yeux ébahis du jeune fils d’un acrobate chinois. Une chanteuse indienne fait des vocalises à quelques mètres d’une régisseuse de son québécoise. Pas le moindre signe de stress ou de nervosité dans tout le cirque. « C’est qu’on fait environ 400 représentations par année, c’est un travail quotidien pour nous », m’explique Stéphane, l’un des clowns. L’effet du décalage horaire se fait ressentir lors du spectacle. Les visages peinturlurés tourbillonnent frénétiquement sous mes yeux. Les plumes d’un costume viennent me chatouiller le visage alors qu’une danseuse passe près de moi. La musique crée des vibrations à l’intérieur de ma cage thoracique. Mon épuisement ne fait que rajouter à la sensation de perte de repères à l’intérieur de ce véritable brouhaha irréaliste qui m’enveloppe lors de cette soirée magique.

PAR ÉLISE PROVENCHER

Un Grand départ

Déjà fatigué, notre premier vol retardé, j’attends avec impatience de prendre l’avion pour la première fois. Après un bref tour d’un aéroport sans attrait pour nous, voyageurs impatients, nous pouvons finalement nous diriger vers notre avion. Un avion minuscule où seulement quelques passagers s’entassent. Nous quittons le sol, c’est l’impression d’être dans un manège qui me prend, aucun stress ne m’habite, je me sens bien, très calme, alors que certains semblent quelque peu inquiets. Un vol rapide s’en suit.

Nous voguons dans une mer de nuages. J’ai l’impression d’être dans un océan de coton, j’aimerais avoir la possibilité de pouvoir m’y coucher, de sauter d’un nuage à l’autre et de sentir la douceur de cette condensation écumeuse.

C’est seulement après une heure que nous entamons la descente. Nous voyons à travers ce voile de cumulus la ville de New York qui se rapproche. La banlieue et les champs viennent à la rencontre de notre regard.

Une fois de retour au sol, nous partons à la recherche, de notre prochain vol. Un labyrinthe s’étend devant nous. Où aller, dans quelle direction se trouve notre terminal? Finalement, nous avons dû prendre un petit wagon, pour pouvoir nous rendre au terminal, pour nous envoler vers notre destination finale. Une fois nos passeports vérifiés, il a fallu que nous attendions, ce qui nous a semblé des heures. Certains d’entre nous avons dormi, d’autres sont allés se promener, les ‘’clic’’ des photos se sont fait entendre à plusieurs reprises. Pour faire passer le temps plus rapidement, en petits groupes, nous avons trouvé des activités. Plusieurs cadavres exquis ont été créés, plus bizarres les uns des autres. Les coiffures superflues de Catherine ont aussi été très plaisantes! Nos éclats de rires ont résonné à plusieurs reprises à travers l’aéroport.

Finalement, nous avons pu nous diriger vers notre terminal, afin de rentrer dans ce monstre de métal, qui nous emmènerait dans les airs et nous permettrait de nous rendre à notre destination, pendant quatorze heures. Quatorze heures qui sont devenues de plus en plus pénibles alors que les heures semblaient passer tranquillement, sans se presser, alors que nous étions de plus en plus inconfortables. Après quelques heures de sommeil, l’écoute de plusieurs films, la tentative infructueuse de vouloir lire un livre, quelques pas dans l’allée de l’avion, nous avons finalement entamé une lente descente vers cette île qui supporte plusieurs millions d’habitants.
Notre aventure venait réellement de s’amorcer.

PAR SARAH-KIM BOUDREAULT